19 mars 2013

Undisclosed desires.

Voilà ce qu'ils murmuraient tous autour de moi, assénant leurs regards sur mon corps fragilisé, comme du sucre sous la pluie: "malade". Pas moi, non, moi ils ne savent pas. Parce que je cache tout, que je prend encore le soin de vivre mal loin d'eux et d'aller bien en leur présence. Mais elle. Elle qui m'a tout entendu lui dire, elle qui a tant de fois pleuré devant mes illusions, elle qui a rit en plongeant sa tête au creux de mes bras. Elle sans qui la vie d'avant n'avait pas le même goût. "Elle est malade elle reviendra la semaine prochaine sans doute". Si ils savaient ils riraient. Mais je ne ris plus, j'attends lascive que les beaux jours reviennent en même temps que son bonheur. Son attachement pour la vie. 

Je sais bien que je ne suis pas celle qui fait qu'elle va bien, que c'est l'Amoureux qui prend cette place. Et par conséquent mes actes et mes paroles qui font passer le chagrin ne s'imposent pas à elle comme le remède dont elle avait tant besoin et que je suis la seule à lui offrir. Il n'y a que chez moi qu'elle dort à peu près bien, certes les cauchemars restent mais les terreurs s'estompent. Et pourtant c'est Lui, qui ne sait rien dire d'autre que le silence pour la consoler, qui l'écoute à demis mots, qui s'échappe dès que l'occasion se présente à lui. Et moi qui affronte le séisme, qui prends de plein fouet les vagues immenses de sa dépression, je n'apparait pas sur le tableau des récompenses. Ça y est le mot est lâché. Oui, encore une dépression. Comme lorsqu'il fait mauvais et que les nuages font leur numéro sarcastique; comme quand on frôle le sol sans le toucher à près de 1000 kilomètres heures. 

Suis-je incapable de rendre les gens qui gravitent autour de moi heureux?

3 mars 2013

Spasme.



Il y eu la foule, cette masse compacte formée autour de moi dont seuls deux visages ressortaient vivants. Il y eu la chaleur dans cette salle aux allures de théâtre rénovée pour la musique, cette vague chaleur qui peu à peu gagnait du terrain. Confrontés à l’excitation que provoquait le groupe, les sons toniques qui nous poussaient au-delà de nos capacités. A deux mètres, cet homme, chapeau cloué sur la tête, chemise blanche et pantalon assorti, cet homme chantait parfois en me regardant et je me sentais mal à l’aise de ne pas connaître comme tous les paroles de sa chanson. Je crois me souvenir vaguement du morceau qui s’amorçait lorsque mes yeux éblouis par une franche lumière bleue se sont évaporés. Et la terreur m’a gagné à mesure que mon corps s’alourdissait, j’ai tenté pendant un moment de lutté contre cette oppression maladive, ce dérobement dont j’étais l’actrice et la spectatrice effarée. Je fixais les pieds de cet homme sur la scène, dans l’espoir de retrouver une contenance, de me réapproprier ce corps capricieux, ce corps ennemi que j’ai maltraité si longtemps. Mais rien n’y faisait, il en était décidé ainsi : je ne pourrais pas retenir le malaise. J’ai retrouvé la parole juste à temps ; me tournant vers L. j’ai babillé quelque chose d’inquiétant et confus. Fallait-il sortir de la salle, prendre l’air et regagner le concert par la suite ? Je ne sais si je m’y suis prise trop tard ou non. Je la vois encore dans le brouillard opaque de cette pièce, me saisir par le bras en m’emmener vers la sortie. « C. tu veux bien prendre mon sac, elle ne se sent pas bien. ». Sans doute rassurée par le ton tendre de sa voix, j’ai dû comprendre qu’il était temps de cesser la lutte, de laisser tomber les armes. Les yeux clos à cause de la faiblesse j’essayais de m’en sortir, au sens propre comme figuré, de m’extirper de la foule sans dommage et de rester en vie. J’ai perdu le fil du moment, j’ignore ce qui s’est dit et si l’on s’adressait à moi dans l’espoir de m’entendre hurler que ça allait.


C’était fou. Sous mes paupières se déroulait un spectacle hallucinant, des flashs violets, uniquement violets, des paillettes peut-être. Une source d’angoisse. Mon corps laissé à l’abandon, piétiné par la foule, bringuebalé de droit à gauche au bon vouloir des spectateurs. Je ressens encore mes membres fébriles et vides ne pas comprendre l’enjeu. Démunie, j’ai l’impression de tomber sans fin vers le sol, que mes pieds ne savent plus ce que je leur ai appris. Et enfin le vide, le silence, l’angoisse. La respiration saccadée, je n’entends même plus mon cœur, tout disparait dans un même mouvement. Un bruissement sans fin s’attaque à mes tympans. Quand enfin je reprends contact avec ma chair, quand je reprends conscience de mon corps, je sens les bras d’un homme. Les bras permettent mon envol maladif, je sens mes jambes quitter enfin le sol sur lequel je menaçais de m’écrouler. Je sais que désormais je ne crains rien, cet homme entre dans ma bulle éteinte et m’emmène vers un endroit calme et sur. « Lâche le bras, lâche le bras » voilà tout ce qui me parvient de ma tourmente. Quand je rouvre les yeux, mon cœur sorti de sa cage se met à battre normalement. Le froid de la ville caresse mes jambes sous mon collant noir. Ils sont là, mes sauveurs, mes héros, les témoins de mon mal-être et de ma négligence envers mon corps. Ils m’observent d’un air inquiet et tendre à la fois. Je suis jolie mais faible sans doute est-ce ce qui traverse leur esprit. Il me pose, mon Hercule, sur les marches glacées du hall d’entrée ; me tendant un verre de coca il débite les habituelles remontrances : « Vous devriez prendre soin de vous ! Vous avez mangé ? Bu ? Fumé ? ». Non, non, non. Laissez-moi mourir sur ce trottoir, disparaitre dans ma fatigue, m’écrouler de nouveau dans la rue et profiter d’un sommeil sombre et creux, presque infini. Ils ne partent pas, de peur que je récidive. Mais personne ne veut entendre qu’une fois le malaise passé, le système coupé et redémarré je ne crains plus rien. Je suis hors d’état de me nuire. La nuit reprend son cours, ma vie aussi. Et je ne dirais rien de tout ça à maman, elle s’inquiéterait bien trop et me sermonnerait surement.